L’union sacrée.
Quand accablé tu erreras sous les denses frondaisons, la foulée lourde de tant de lieues enchainées, sur ton front l’ombre impitoyable des carnages endurés. Quand le chaos à ton esprit et ton regard las dérobera le chemin, dès lors, plante ton épée en cette terre qui est mienne et ne cherche plus. Vois ! Dans l’air virevoltent mille chatoyants flocons, doux pollens sous le soleil. Et les rayons de l’astre s’immiscent entre les ramures, se déployant en flaques mordorées sur la jonchée des sous-bois.
La rivière est proche, apaise ta soif dans la pureté de ses ondes. Repose ton dos fourbu contre ces roches aux vertes mantes. Laisse tes mains frôler la peau parfumée des saules, les galons entrelacés du lierre, l’éventail dentelé des fougères. Entends-tu les claires ritournelles de mes oiseaux ? Ils récitent pour toi les lais que je leur ai enseignés. L’air clément du crépuscule viendra panser tes plaies, car de mon être tout entier il émane, tel un onguent bienfaisant.
Bientôt je murmurerai ton nom. Des mondes souterrains à la cime des arbres, s’annoncera la gent de mon royaume, en un luminescent cortège, leur pas lestes dans les miens.
Sous l’éclisse de lune, sourire divin transcendant le noir visage de la nuit, je danserai pour toi. Que tes paupières ne cillent pas lorsque mes bras t’enlaceront ou le temps, à jamais, nous dérobera l’un à l’autre. Sous l’étreinte, reste éveillé mon aimé, révélé à toi même sans crainte. Comme le fleuve se dissout dans la mer s’évanouiront tes torpeurs passées. Nul cri, nulle supplique, nul combat car apaisé, de mon peuple tu deviendras souverain ! Et les mortels passeront là, devant l’écrin sinople de nôtre trône. Pèlerins au message d’amour, ils s’inclineront face à l’immuable.
Et s’ils s’abîment, de désespoir l’âme rompue, notre étoile ne manquera jamais de rayonner en amont de leur calvaire. De nos bras ouverts à leurs prières s’échapperont mouettes et cormorans, leurs mélopées plaintives en hymne éternel à ceux que l’océan garde jalousement. Nos enfants chuchoteront et joueront auprès de leurs demeures et s’en feront les hôtes fabuleux. Nous garderons vivaces les brasiers offerts à la musique de leurs flûtes et de leurs vasques de bronze. Voilà pour eux afin qu’ils content à leurs têtes blondes, notre union sacrée.